Agasa : le DG désavoue son adjoint après une inspection de deux usines insalubres d’eau en sachet

L’Agence gabonaise de sécurité alimentaire (Agasa) est secouée par une crise interne depuis une descente musclée, filmée et largement médiatisée, opérée le 23 mai dernier par le directeur général adjoint, le commandant Oscar Sadibi Mapangou. Dans un communiqué daté de ce mardi 27 mai, le directeur général, Jean Delors Biyoghe Bi Ntougou, désavoue formellement cette initiative, qu’il qualifie d’illégale et menée en violation des textes en vigueur.

Les descentes, conduites à Plein-Ciel dans le 5e arrondissement de Libreville et à Essassa dans la commune de Ntoum, visaient deux unités clandestines de production et de vente d’eau en sachet, installées dans des conditions d’hygiène jugées « déplorables ». Dans un reportage diffusé sur la télévision publique, le commandant Mapangou s’indigne face aux caméras : « Ces usines sont insalubres. Elles doivent être fermées sans délai. Elles ne respectent aucune norme de sécurité sanitaire. »
Une intervention saluée… mais désavouée
Si une partie de l’opinion publique a salué la fermeté du DGA, soucieuse de la qualité de l’eau consommée, la direction générale a aussitôt réagi par voie officielle. Dans son communiqué, Jean Delors Biyoghe Bi Ntougou rappelle que seuls les agents assermentés, habilités comme officiers de police judiciaire à compétence spéciale, peuvent légalement mener de telles inspections.
Le reportage vidéo de cette double descente
Il qualifie cette action de « confusion volontairement entretenue », dénonçant un parasitage de l’action institutionnelle. Il ajoute que l’opération n’a été précédée d’aucune autorisation administrative, ni conduite dans le respect des protocoles fixés par les textes communautaires (CEEAC, CEBEVIRHA) et nationaux. « L’Agasa ne saurait cautionner des pratiques qui relèvent d’un autre temps, où l’autoritarisme se substituait à la rigueur des textes », affirme-t-il.
Un duel de méthodes en plein jour
Ce désaveu révèle une fracture désormais manifeste au sommet de l’Agasa. D’un côté, un directeur général défenseur de la procédure et du droit ; de l’autre, un adjoint au tempérament plus direct, qui plaide l’urgence sanitaire et la nécessité d’agir face à l’inaction supposée des services. La médiatisation de son intervention a accentué les tensions, l’opposant de fait à sa hiérarchie.
Les deux hommes à couteaux tirés
Le commandant Mapangou, ancien officier de gendarmerie, a revendiqué son action comme une réponse aux « menaces graves pour la santé publique ». Mais pour le DG, il s’agit d’un acte isolé, sans fondement administratif, et contraire à l’esprit de réforme actuellement porté par les autorités.
Une institution fragilisée
L’Agasa, censée incarner la rigueur et la transparence dans la lutte contre les fraudes alimentaires, voit ainsi sa crédibilité ébranlée par une guerre ouverte entre ses deux dirigeants. Dans un contexte où les attentes citoyennes en matière de sécurité sanitaire sont fortes, cette crise fragilise une institution clé.
Le directeur général en appelle à la tutelle pour une clarification urgente des rôles et un rappel au respect de la chaîne de commandement. « Nous œuvrons à la restauration de la légalité, dans la vision du président Brice Clotaire Oligui Nguema pour une administration crédible et disciplinée », écrit-il.
Vers des sanctions ?
En coulisses, la possibilité de sanctions est évoquée pour rétablir l’ordre hiérarchique. Certains appellent à arbitrer clairement entre la légalité des actions entreprises et leur efficacité visible sur le terrain. Car si les méthodes du commandant Mapangou posent question, elles ont eu un écho favorable chez une population souvent confrontée à la vente de produits impropres à la consommation.
Cette affaire révèle, en creux, les tensions entre efficacité immédiate et rigueur institutionnelle, au cœur du chantier de modernisation de l’administration gabonaise. À l’Agasa, une clarification est désormais inévitable. Soit pour recadrer, soit pour trancher.
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