La sécurité routière au Gabon : Une ambition au-delà des incantations

Alors que les drames de la route continuent d’endeuiller les familles gabonaises dans un silence d’État quasi constant, Istovant Nkoghe tire la sonnette d’alarme. Dans cette tribune incisive pour les lecteurs d’Info241, l’avocat et président de l’Alliance démocratique et solidaire (ADS) interpelle les autorités sur l’urgence de repenser la sécurité routière au Gabon. À la croisée des responsabilités institutionnelles et des enjeux de gouvernance, il plaide pour une politique pénale cohérente, un code de la route consolidé, et une véritable volonté politique face à ce fléau national. Lecture.

Quel Gabonais n’a pas en mémoire, le souvenir douloureux d’une route lézardée de sillons pourpres et carmin, du dernier soupir d’un proche, brutalement arraché à l’affection des siens.
Je me suis toujours dit sans pudeur, que si j’étais Garde des Sceaux ou Premier policier du Gabon, la priorité de mon action serait la sécurité routière, outre les affaires de mœurs. Et qu’en l’espèce, ma politique serait non seulement ferme, mais aussi profonde.
Le Gabon, avec une population estimée à environ 2,3 millions d’habitants, enregistre chaque année un nombre préoccupant de morts sur les routes. En 2023, plus de 1 500 accidents ont été recensés, causant un nombre significatif de décès et de blessés graves. Par exemple, lors de la seule période des fêtes de fin d’année 2022, 35 décès ont été enregistrés en moins d’un mois, sur un total de 120 accidents.
Rapporté à la population, cela signifie que le taux de mortalité routière au Gabon est particulièrement élevé. Si l’on considère une estimation annuelle de plusieurs centaines de morts (les chiffres précis varient selon les sources et les périodes), cela place le Gabon parmi les pays africains les plus touchés par la mortalité routière rapportée au nombre d’habitants. Ce fléau représente donc une cause majeure de mortalité évitable et un enjeu de santé publique de premier plan pour le pays.
Nous avons suivi avec attention l’intervention du Ministre d’État en charge des Transports, qui annonçait, le 22 mai passé, un durcissement significatif des sanctions à l’encontre des auteurs d’infractions routières. En l’espèce, il ne faut pas oublier qu’il n’est hélas que le ministre des Transports. En matière de politique pénale routière, il n’a aucune compétence. ADS attendait tout de même, une sortie du genre, depuis notre livre blanc sur la sécurité routière, transmis à l’attention du Comité d’organisation des questions prioritaire du Dialogue national. De ce dialogue, il n’en est rein sorti. Pour la majorité, la priorité c’était l’élection du Président et, pour nous, la vie humaine, la santé, l’éducation et l’économie.
La politique de sécurité routière au Gabon est en réalité une action combinée, entre le Ministère de l’intérieur, le Ministère de la justice et le parlement, au plan institutionnel (1) Au plan logistique, entre le ministère des Transport, le ministère de la santé, les agences de contrôle techniques et les sociétés d’aménagement routier et les Villes (2).
(1) Sur un plan institutionnel : Un cadre législatif clair et punitif
Il n’y a pas à proprement parlé de Code de la route au Gabon. Les dispositions en vigueur se partagent entre d’une part, le Code pénal Gabonais, qui prévoit des dispositions délictuelles générales et leurs sanctions. Il intègre également les infractions routières. La question de la sécurité routière est donc un paragraphe dans le Code pénal (article 45 à 55 CPG). Comme la sécurité routière est une parenthèse entre deux élections.
Pour bien faire et pour être en accord avec la bonne gouvernance et la sécurité juridique, le Gouvernement doit proposer au Parlement un Code de la route consolidé. Avec une politique claire, mais ferme. C’est une question qui devrait avant tout préoccuper le Premier policier du Gabon.
(2) Des projets ambitieux pour la sécurité
C’est le deuxième volet du sujet. Il faut également des routes sûres. Des mesures de protections des piétons. Des édifications dans les règles de l’art de la sécurité routière. Cela passe en outre par des éclairages véritables, sur toutes les zones de circulations routières.
La ville de Libreville, doit s’engager sur une politique urbaine axée autour de la salubrité et de la sécurité routière. En l’espèce, le Cœur du Centre-ville de Libreville (Zone, Pélisson, etc.) devrait pourvoir être une zone exclusivement piétonne, interdite à la circulation des véhicules.
La question de la sécurité routière est en effet, complexe et multisectorielle. Le seul « coup de gueule » du Ministre des transports en la matière et nous le craignons est un miaulement. La véritable ambition à l’intérieur.
Istovant NKOGHE , président de l’Alliance démocratique et dolidaire (ADS)
@info241.com
